Steinlen, une apothéose de chats

Publié par Viviane Caroline S sur 20 Novembre 2021, 02:57am

Catégories : #Biographie, #Chat, #Peinture, #Steinlen, #Viviane Caroline SZ

L'apothéose des chats

Artiste prolifique, Steinlen ne fut pas moins que : peintre, dessinateur, affichiste, caricaturiste, illustrateur, graveur et sculpteur. Son plus grand attrait à mes yeux subjectifs d’amoureuse des félins, c'est d'être leur "spécialiste" à eux !

Théophile-Alexandre Steinlen, né à Lausanne,

20 novembre 1859 - 14 décembre 1923

D'origine bourgeoise, naturalisé Français vers l'âge de quarante ans, la diversité d'expression de cet artiste anarchiste va de pair avec son esprit égalitaire ouvert à tous les milieux sociaux ; il lui a donné toute son ampleur dans la fréquentation du Chat Noir, dont il est l’auteur de la célèbre affiche.

N'est-elle pas piquante l'inscription formant une auréole autour de la tête du chat ? Une évocation railleuse d'un cri de charge guerrière du Moyen-âge ! Et détournée pour devenir :

" MONTJOYE, MONTMARTRE" !

🐈 " Les murs de Paris ont été ennoblis de la présence de ce chat auréolé, hiératique et byzantin, de proportions énormes, dressant au-dessus de la foule sa silhouette fantastique et décharnée " (1)

Inlassable "croqueur" de chats, Théophile-Alexandre les a représentés dans toutes leurs mimiques, les douces comme les coléreuses, jouant sur la gamme du chaton espiègle au fauve à l’affût, comme sur celle des attitudes curieuses, méditatives ou enjouées. Il les a montrés dans des poses altières ou des repos alanguis, s'immortalisant à travers eux, particulièrement dans sa géniale affiche emblématique du Montmartre du XIXème siècle.

Steinlen dans son atelier (1913) / Ph. Agence de presse Meurisse

Sur la photo, on voit l'artiste en plein travail de sculpture dans son atelier, un lieu situé au coeur de Montmartre, et nommé - qui s'en étonnera ? - : Cat's Cottage !

Sa rencontre, en 1884, puis la collaboration artistique avec Rodolphe Salis, propriétaire du Cabaret et de la revue, fut le véritable point de départ de la notoriété de Steinlen. Dans ce lieu mythique, tout est devenu possible ! Un véritable "bouillon de culture" où se sont croisés et mélangés nantis en goguette et sans-le-sou notoires, “petit peuple” et “grand monde”... où se sont exaltés et exprimés poètes et chansonniers en vogue sur le pavé, peintres et autres artistes inspirés, enfin tout ce que le Paris de la fin du XIXème siècle comptait de vie ardente et colorée.

Chat noir campant devant la butte Montmartre

Le Cabaret du Chat Noir... si bien symbolisé par ceux d'entre les chats qui portent couleur de nuit...

Ayons une pensée pour la mémoire féline du modèle de l'affiche. Inspiré par un chat croisé dans sa ville natale, c'est lui, c'est sa trace mémorielle qui figure sur l'affiche. Et Steinlen nous en dit ceci :

✒ " ... à peine ai-je eu besoin de l'amplifier pour en faire un soleil :
il rayonnait de tous ses poils écarquillés. "

Mais évidemment la notoriété de Steinlen ne se résume pas à l'affiche connue de tous tant dans l'Hexagone qu'au-delà de ses frontières. En une douzaine d'années, jusqu'à la fin du XIXème siècle, Steinlen ne réalisa pas moins d'une centaine de dessins de chats pour la revue du Chat noir dédiée à la ce lieu emblématique que fut le Cabaret du Chat Noir, lieu si bien nommé... Plutôt que gris, la nuit tous les chats noirs ! Du noir des mystères, qui, on le sait, jamais ne se dévoilent le jour.

Variante à l'image de couverture, en voici une autre version, ici déclinée en bleue. C'est celle qu'en toute subjectivité je plébiscite pour Merlin chat conteur : c'est L'Apothéose des chats.

L'Apothéose des chats ! Quel titre déjà que celui-là ! Une oeuvre monumentale (164,5 X 300) que l'on peut voir au musée de Montmartre mais qui se trouvait initialement dans le Cabaret du Chat Noir lui-même. Et dont il se dégage un tel mystère qu'elle fascine, inquiète, voire fait peur à certains. Car c’est un monde de chats, une terre totalement investie par eux... bien loin, il est vrai, d'une réalité autre. Car chacun sait ici que le chat est un parfait individualiste, à des exceptions près toutefois de félins heureux dans la tendresse d'une fratrie de sang ou recomposée... mais ne sommes-nous pas, avec Steinlen, dans le monde absolu du chat rêvé ?

Girouettes chats (où l'on voit l'année : 1896)

Avec le monogramme de l'artiste ci-dessous, quelques images de Steinlen pour terminer : de l'enfance au crépuscule de la vie, du jour à la nuit qui berce... la nuit, où le chat Soleil de Lune veille sur le monde mystérieux.

— Viviane Caroline SZ, biographe de chat, le 20/11/2018

Ajouts et mise à jour le 19/11/2022

(1) Propos élogieux d’un critique du "Siècle"

(2) Le monogramme :

le S de Steinlen encercle T et A unis, pour Théophile Alexandre